La plupart de votre travail est réalisé à la mer, en bordure ou au
cœur des vagues, véhiculant souvent un sentiment d'immensité et de
solitude. Quand cela a-t-il commencé, qu'est-ce qui vous a attiré en
premier lieu dans cet environnement ? J'ai commencé à prendre
des photographies de l'océan en 2006, mais mon amour pour la mer remonte
à 1986 quand j'ai découvert le surf. L'océan est devenu dans mon
esprit, année après année, une sorte d'exemple à suivre - le reflet d'un
idéal de vie. Ses vagues, comme décrites par Jack London, sont "les
chevaliers de l'armée de la mer infinie", portant avec elles la
simplicité, l'élégance, le pouvoir et la liberté.
Pouvez-vous
nous parler de ces deux photographies ? Quand ont-elles été prises, à
quel corpus plus large d'œuvres appartiennent-elles ?Ce sont toutes deux des images récentes, prises en 2013.
Intersections 28
a été réalisée sur la côte occidentale de l'Italie, à Marina di Pisa,
ma ville natale. L'autre photographie, celle du van, a été prise au
Portugal, au sud de Lisbonne, dans une région appelée Alentejo, cette
plage, appelée Praia do Malhão est devenue une seconde maison pour moi
ces temps-ci.
A van in the Sea 11 fait partie d'une série
que je viens de commencer ; le van lui-même représente une décision
importante que j'ai prise voici un an, à savoir dédier la quasi-totalité
de mon temps à la production artistique, plutôt que commerciale. J'ai
voyagé avec ce van jusqu'au Portugal et il est devenu ma maison pour la
majeure partie de l'année. Mes journées consistaient à photographier la
mer, je dormais à proximité, dans le van.
Intersections est
un de mes grands projets, et il a suscité un intérêt international au
cours de l'année 2012-13. Il se concentre sur ce très bref moment où
l'eau de la mer se mêle aux nuages d'un ciel orageux, créant l'espace
d'un instant cette abstraction éphémère et unique.
Quel rôle le voyage tient-il dans votre pratique et dans votre processus créatif ? Travaillez-vous seul ? J'ai
découvert que la côte Atlantique de l'Europe toute entière était
parfaite pour mon sujet de prédilection. Je suis aujourd'hui basé au
Portugal mais je suis toujours prêt à sauter dans un avion vers le nord,
que ce soit pour l'Angleterre ou la France.
Je travaille toujours
seul. Photographier l'océan est un exercice de patience : vous devez
attendre la bonne lumière, le bon ciel, la bonne dose de vent et
peut-être la bonne marée, c'est très imprévisible, je préfère donc être
seul. Cela peut sembler ennuyeux mais quand les conditions sont réunies
je peux passer la journée entière devant la mer, je ne pense pas qu'un
assistant partagerait ma fascination.
Vos photographies
prennent parfois un tour très pictural - vous les retravaillez comme
vous appliqueriez des couleurs avec un pinceau sur une toile. Quel est
votre processus créatif, avant/pendant/après la prise de vue ? Mes
photos sont très profondément enracinées dans le romantisme, je pense
plus précisément aux œuvres de JMW Turner et Caspar David Friedrich.
C'est pour cela qu'elles ont cette apparence très picturale. Le
processus, une fois la prise de vue réalisée, est très simple. Je
travaille avec un appareil numérique et convertis mes fichiers bruts
avec un logiciel appelé Capture One, ensuite je les manipule un peu à
l'aide de Photoshop, cette intervention se limitant à l'ajustement des
couleurs, je les dé-sature, les modifie quelque peu afin d'accentuer
l'effet de tridimensionnalité. Mais c'est réellement à la prise de vue
que tout se joue : cela tient à l'atmosphère, de grosses vagues ne
suffisent pas. Comme je l'ai dit, j'ai besoin du bon ciel, peut-être un
peu de soleil à travers les nuages, de forts vents... en d'autres
termes, il faut qu'un tableau romantique se déploie en face de moi.
Édition limitée, numérotée et signée par l’artiste.