Construite dans les années 1920 par Robert Mallet-Stevens, à la
demande de Charles et Marie-Laure de Noailles, un couple de mécènes très
liés à l'avant-garde de l'époque, la villa Noailles prend place au
sommet d'une colline, dominant la ville d'Hyères et la Méditerranée.
Quand avez-vous découvert la villa ? Quelle a été votre première
impression ?J'ai découvert la villa en 2003, à l'occasion de ma
participation au festival de mode et de photographie. Dans ce contexte,
j'ai immédiatement perçu la villa comme un lieu de rencontres,
d'échanges, de culture mais aussi de fête. C'est un espace à la fois
très grand et labyrinthique mais aussi plein de surprises et de recoins,
à échelle très humaine.
Comment avez-vous abordé cette carte blanche, vous qui êtes plutôt habitué à l'univers du studio ?Je
suis non seulement plus habitué au studio mais aussi plus familier de
la commande, il m'a donc fallu identifier et circonscrire mon projet.
Les limites géographiques de la villa étaient un bon début, puis je me
suis appuyé sur l'histoire même de ce lieu, sur la façon dont il fut
conçu comme espace de villégiature mêlant création et récréation. J'ai
ré-écris des fictions à partir de certains éléments de l'histoire de la
villa en invitant à mon tour des créateurs à intervenir.
L'histoire
de la villa Noailles, chargée de nombreuses présences illustres telles
que Man Ray ou Luis Buñuel, est-elle un héritage intimidant ou une
joyeuse source d'inspiration ? On croise dans les archives de la
villa des figures majeures de l'art du 20ème siècle (Dalí, Cocteau,
Giacometti...) et l'on songe évidemment à la densité des œuvres qui
habitaient ces esprits mais on tombe parfois sur une photo représentant
Man Ray (et c'est lui qui est figuré par ce masque blanc dans mon image)
portant une passoire sur la tête à l'occasion d'une soirée à la villa et
on se sent alors moins complexé et surtout enclin à transmettre la
légèreté et la spontanéité dont ils étaient capables.
Il y a beaucoup d'ombres, de fantômes dans ces photographies. Quelle ambiance y-a-t-il dans cette villa la nuit ?Ce
n'est qu'après avoir largement entamé les prises de vues que j'ai
remarqué la récurrence des ombres et figures fantomatiques. Pas
seulement le fantôme des anciens occupants et de l'architecte mais aussi
le spectre des événements fictifs et des constructions improbables (une
des formes noires sur la photographie de la villa n'est qu'une découpe
en ombre chinoise ajoutée à la prise de vue).
La villa reste, de jour comme de nuit, un lieu de tous les possibles.
Édition limitée, numérotée et signée par l’artiste.