Les deux images sélectionnées ici ont été réalisées en Bolivie. Vous travaillez depuis plusieurs années dans ce pays, qu’est-ce qui en fait un lieu de prédilection pour vos installations ?Un jour, j’ai entendu parler d’un artiste bolivien qui utilisait un lac (Laguna Verde) en guise de galerie ; il y organisait des expositions et des performances. Le lac est situé au sud, très difficile d’accès, sans aucune route pavée pour s'y rendre. J’étais intriguée par cette idée et j’ai tenté de retrouver cet artiste. Après une longue recherche, j’ai enfin trouvé son nom – Gastón Ugalde – et lui ai envoyé une proposition pour y exposer, il m'a répondu et m'a aidé à finaliser le projet.
Sur la route de Laguna Verde, on a traversé de nombreux autres sites, comme le désert de sel et la Laguna Colorada (le lac rouge).
Je travaille avec Gastón depuis 2004 maintenant, j’ai donc fait de nombreux voyages en Bolivie, souvent dans les montagnes.
J’aime la vastitude de ces paysages, il y a une sorte de pureté, peu d’hommes et peu d’interventions humaines. Vous ressentez pleinement le pouvoir de la nature et votre propre insignifiance. Vous pouvez rouler des jours sans croiser personne, c’est incroyable !
Votre travail requiert un long et parfois difficile processus de préparation et de construction, impliquant souvent la collaboration des locaux, qu’ils soient mineurs dans le désert de sel en Bolivie ou habitants d’Igloolik dans le cercle arctique. Les installations que vous construisez dans ces terres lointaines s’inspirent aussi souvent de l’imagerie et des croyances locales. Pouvez-vous nous dire comment vous avez réalisé les deux images sélectionnées ici ?Une grande partie de mon travail consiste à trouver le bon endroit, repérer les personnes qui peuvent m’aider à atteindre ces sites et à construire les œuvres. La plupart du temps, je voyage seule avec un sac à dos contenant tout mon matériel photographique. Donc je suis assez dépendante des gens que je rencontre sur mon chemin : cela peut être des Inuits d’un petit campement dans l’Arctique canadien ou des mineurs de sel boliviens.
Ces deux images, « Carpets » et « Hats », ont été réalisées dans l’Altiplano bolivien et reflètent cet environnement. Dans « Carpets », j’ai joué avec la tonalité verte du lac, presque semblable à une aquarelle ; dans ce paysage sauvage, j’ai disposé des tapis dont les couleurs pastel se mêlent à celle de l’eau.
Dans « Hats », j’ai acheté des chapeaux dans un marché local et je les ai laissés flotter dans un paysage de montagnes. Un peu comme dans un film de cow-boys. Dans un sens, j’ai aimé regarder ces chapeaux faire leur chemin tous seuls dans le grand vide de ce paysage.
Ces dernières années, vous avez voyagé et travaillé dans les montagnes de Chine, le cercle arctique et le désert de sel. Qu’est-ce qui vous attire vers ces destinations si lointaines ?Je crois que c’est important pour moi de trouver des espaces qui ne contiennent pas de traces d’interventions humaines, où la nature domine. Ce besoin est sans doute lié au fait que j’ai grandi aux Pays-Bas, territoire où la totalité du paysage a été façonnée par l’homme et où il n’y a pas de « pure nature ».
Je suis aussi simplement attirée par la beauté de ces paysages isolés, par leur magie. Par exemple, le désert de sel de Bolivie est un immense paysage blanc, presque comme une grande feuille blanche placée devant vous. Comme si le paysage décidait de l’issue de l’œuvre.
Édition limitée, numérotée et signée par l’artiste.